Onze poèmes sur le printemps
Ces poèmes sont extraits du Man.Yôshû, anthologie d'environ quatre mille cinq cents poèmes japonais, faite vers le milieu du VIIIème siècle, et traduits par R. Sieffert :
Poème du prince de Shiki pour exprimer sa joie :
Du rocher bondit
la cascade et par-dessus
pousses de fougère
faisant jaillir verdoyantes
voici venu le printemps
Deux poèmes do moraji de Wohari (son nom manque) :
Au mont printanier
dans une profusion de fleurs
de m'amie qui cueille
jeunes herbes les blancs cordons
je regarde charmant spectacle
Voici venu ce semble
printemps qui fait ployer les feuilles
car au creux des monts
sur les rameaux lointains je vois
fleurs qui vont s'épanouissant
Poème de Yamabe no Sukune Akahito :
A Kudarano
sur une vieille branche de lespédèze
pour attendre le ptrintemps
un rossignol s'était perché
est-ce point lui qui aura chanté
Fleurs des pruniers
du village de Kasuga
où se lève la brume
au vent qui descend des monts
point ne vous dispersez
(poème de Otomo no Sukune Murakami)
Un poème de la dame Takata (elle est la fille de Takayasu) :
La petite violette
de la lande où fleurit
la corète d'or
sous cette pluie printanière
la voilà qui s'épanouit
Man.Yôshû, VIII.
Deux poèmes composés l'an deux de Tenpyô-Shohô, au soir du premier de la troisième lune, en contemplant les fleurs des pêchers et pruniers d'un jardin printanier :
Jardin printanier
jetant un rouge éclat
fleurs de pêcher
et sur le chemin qu'elles éclairent
jouvencelles s'en sont allées
De mon jardin
est-ce les fleurs de prunier
ou sur le jardin tombée
neige légère qui point encore
entièrement n'est fondue
Man.Yôshû, XIX, Ôtomo no Sukune Yakamochi.
Un poème sur le mont Kagu de Kamo no Kimi Tarihito (suivi de deux poèmes courts) :
Du ciel descendu
au céleste mont Kagu
quand brume s'élève
et que vient le printemps
au vent des pins
sur l'étang vagues se lèvent
fleurs de cerisiers
obscurcissent l'ombre des arbres
du côté du large
le canard appelle sa compagne
du côté de la berge
une troupe de canards s'ébat
et les barques sur lesquelles
venaient se divertir
gens du grand Palais
aux cent assises de pierre
sans barre ni perche
sont échouées piteusement
de n'avoir plus de rameurs
Envois :
Que nul plus ne rame
en voici bien le signe
canard et sarcelle
qui plongent dans les eaux
sur la barque font leur nid
En l'espace d'un instant
ils ont pris un aspect antique
du Kaguyama
les sugi en fer de lance
au pied couvert de mousse
Man.Yôshû, III.
Note: les sugi sont des "arbres géants au tronc élancé se terminant en pointe".